La première fois que...

Publié le 23 Septembre 2014

La première fois que j’ai décompensé j’ai cru que j’étais devenue folle.

Pourtant rien ne m’avait préparée à ça.

A 23 ans, j’attendais mon premier enfant. La date prévue pour l’accouchement était dépassée de 10 jours et je n’en pouvais plus d’attendre.

Puis tout s’est bousculé. Lors d’un monitoring la décision fut prise de provoquer l’accouchement. Le bébé était en détresse fœtale. Je ne trouve que des mots pour décrire l’anticipation de la naissance associé à la crainte que quelque chose se passe mal.

Tension

Douleur

Peur

Espoir

Le souvenir de mes mains crispées sur celles de mon mari, de nos regards anxieux qui se croisent,

Forceps

Poussez !

Un petit corps entraperçu, la tête bleue, puis l’attente pendant qu’ils s’occupaient du bébé dans la pièce à côté.

Et enfin…un cri. Une respiration. Je devrais dire deux car j’avais retenu la mienne dans l’attente intenable.

C’était une fille. Le soulagement, la joie, un très grand bonheur et un sentiment de responsabilité immense m’envahirent d’un coup.

Une phrase du gynécologue « heureusement que vous êtes venue à temps…le cordon autour du cou l’empêchait de descendre…demain aurait été trop tard » a poussé mon sentiment de bonheur vers celui de l’euphorie.

Nous ne nous sommes rendu compte de rien pendant la semaine d’hospitalisation. Notre fille était belle. Tout se passait très bien. Trop bien.

Puis pendant le trajet jusqu’à la maison, j’ai ressenti comme un décalage dans le temps. Tout était calme dans la voiture mais dehors, tout allait si vite !

En raison du retard sur la date de l’accouchement, mon mari n’avait plus de congés et dès le lundi je me suis retrouvée toute seule à la maison avec le bébé.

Je m’occupais d’elle pendant la journée, et je me levais la nuit pour ranger et faire le ménage. Très vite je me suis mise à arracher le papier peint dans les WC, à faire lessive sur lessive et empiler tout le linge mouillé sur le balcon. Je me suis crue investie de pouvoirs surhumains. Je comprenais les animaux, je pouvais guérir mon voisin atteint d’un cancer en faisant cuire des marrons dans ma cafetière…

Nous étions fin septembre, je promenais ma fille sans la couvrir, bref, sans m’en rendre compte j’avais perdu le contact avec la réalité.

Une hospitalisation d’urgence était nécessaire. Je n’étais plus en mesure de décider pour moi-même. Le choc de l’hospitalisation en psychiatrie et la séparation totale avec mon enfant pendant 6 semaines ont été très dur.

C’était la première fois que j’ai décompensé. J’ai cru que j’étais devenue folle.

Rédigé par Michelle@L'Arbresle

Publié dans #Histoires courtes

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